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lundi 22 avril 2019

En trois jours, je le reconstruirai


Jeudi Saint 2019

Le repas de Pâques du Seigneur est ce dernier moment d’intimité entre Jésus et ses disciples. Il leur offre ses dernières paroles. « Aimez vous les avez autres comme je vous ai aimé » : c’est le testament de Jésus qu’il ne laisse.
La petite communauté des disciples n’est pas sans rappeler l’Église d’aujourd’hui. Alors que Jésus va célébrer la Pâque et vivre sa propre Pâque (le Passage vers son Père ; Jn 13), la petite communauté des disciples est au bord de l’implosion.
Tout avait pourtant si bien  commencé… rappelons-nous les bords du Jourdain où Nous avions entendu l’appel du Maître : « viens et vois… ». Les disciples avaient vécu avec beaucoup de joie les premiers succès de la mission de Jésus venu guérir les malades, sauver les pêcheurs, libérer les hommes de leur esclavages : mondanités, orgueil, jalousie… Il y avait bien eu les premières désillusions lorsque que l’annonce du Royaume a dû affronter la dure et froide réalité de ce monde gouverné selon l’ordre des puissants et des savants ne voulant pas être remis en cause.
À l’heure du jeudi saint, il ne reste autour de Jésus qu’un petit groupe restreint de disciples.  La tension est palpable pendant ce dernier repas.  Une crise couve. Judas a déjà vendu son ami quelques heures auparavant. À Gethsémani, après avoir vu le visage défiguré de Jésus, Pierre reniera son ami : « je ne le connais pas ». Tous les autres disciples vont fuir cette nuit-là.  Personne ne va soutenir et défendre Jésus, livré aux mains de ses bourreaux.
Pour les proches de Jésus c’est tout qui s’écroule. Un peu comme cette cathédrale Notre-Dame, et comme notre église touchée par les crimes d’abus sexuels qui font entrer l’Église dans une grave crise morale. Le corps du Christ est comme défiguré par le péché des hommes et risque à tous de moment d’être disloqué.
Et pourtant, il nous revient, à la mémoire, cette promesse inouïe de Jésus :
« Détruisez ce temple et en trois jours je le relèverai » (Jn 2,19 ; Mc 14, 58).

Et c’est au pire moment de la crise que traverse la communauté primitive des disciples, que Jésus institue l’eucharistie. Ce soir, une fois encore, il nous redit : « Ceci est mon corps livré pour vous ».
Prenez mangez voici mon Corps,
le pain de vie qui est brisé pour vous.
Prenez, mangez voici mon corps qui est donné pour vous.

Prenez, buvez voici mon sang
Source de vie qui est versée pour vous
Prenez,  buvez voici mon sang qui se répand pour vous.

Comment ne pas entendre ces paroles en écho à notre situation historique inédite :
1. Dislocation du corps social (dont le mouvement des gilets jaunes est le symptôme).
2. dislocation de l’Église.

Au cœur de ce drame,  Jésus annonce la reconstruction de son corps ; le rétablissement de la communion par sa vie livrée. Une communion reconstruite par un amour qui a été jusqu’au bout :
« Jésus ayant aimé les siens qui étaient dans le monde les aima jusqu’au bout ».






La communion est rétablie par ce geste d’humilité profonde : le lavement des pieds.

Ce lavement des pieds dit l’humilité de notre Dieu qui nous supplie, à genoux, nous nous réconcilier. Le lavement des pieds annonce son sacrifice, le sacrifice de sa vie sur la Croix, et jusqu’à sa descente aux enfers.
Jésus, Tu as échangé ta vie pour la mienne
C’est l’extraordinaire témoignage de la miséricorde divine.

En cela, celle qui aura le mieux imité Jésus, c’est Marie, Notre Dame.
Comment ne pas penser, en ces jours, à Notre Dame, Marie, qui peut-être  à sa manière, en se laissant dépouillée, par les flammes, de sa parure de Reine du Ciel, est venue à notre chevet,
1. au chevet de la France qui risque la dislocation 
2. au chevet d’une Eglise bien malade avec la crise morale qu’elle traverse.
Je vois cette croix de feu impressionnante et j’ai vu du haut de la cathédrale Notre-Dame.
J’y vois le signe de cet abaissement de Jésus et Marie (la Pieta) venus une nouvelle fois relever la France et les nations, nous prendre par la main et nous tirer de notre péché mortifère.
Jésus si tu as tout donné,  je veux tout donner
Si tu as choisi d’aimer,  je veux aimer.

Homélie prononcée par Jean-Emmanuel Garreau, le jeudi 18 avril 2019, à l’église Saint Paul du Sanitas

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