Il y a presque 20 ans, je me
trouvais là à votre place. Etudiant de l’université de Tours participant à la
vie de l’aumônerie. En 20 ans le monde a bien changé… à mon époque, le mur de Berlin venait de tomber... ; on ne connaissait pas encore internet,
facebook ou l’ipad ! Et pourtant, quand je vous regarde, quand je vous entends
raconter votre vie, exprimer vos aspirations, vos joies et vos soucis ; je
nous revois bien – moi mais aussi mes amis de l’époque – avec ce même désir de
vie, d’une vie qu’on ne voulait pas vivre qu’à moitié, d’une vie pleine de
projet, une vie intense et étoilée que l’on rêvait souvent ! L’Avenir et
ses promesses était devant nous comme une page blanche à écrire ! Un désir
d’aimer et d’être aimé, désir de se mettre au service des autres, désir d’une
société plus juste et plus fraternel… désir de la sainteté ! Quelque soit
l’époque où nous vivons, la jeunesse apporte au monde, toujours ancien pour un
jeune, un souffle nouveau, un élan de vie et de joie capable de soulever des
montagnes et d’ouvrir des horizons. Le pape François dans son homélie à l’entrée
de la semaine sainte redisait son espérance dans la jeunesse.
Il y a eu le printemps de 1968,
il y a aujourd’hui un nouveau printemps de la jeunesse qui se lève, un air de « révolution »
pas seulement en France (comme dimanche dernier place de l’Etoile) mais dans le
monde entier ! Avec toujours cette aspiration à la liberté, à la justice
et en particulier en direction des plus fragiles ! Lorsque les JMJ ont
commencé avec Jean-Paul II, on a souvent associé cet évènement à une « Révolution
de l’Amour ». Jean-Paul II, tout comme Benoit XVI, parlait d’une Civilisation de l’Amour qu’il nous faut
construire ensemble. C’est cette grande UTOPIE qui ne cesse d’animer l’Eglise
depuis ses commencements. Cette PROMESSE n’est autre que celle qui traverse l’Evangile
dans les Béatitudes, la prière de Marie du Magnificat… Un retournement du monde !
« Le Seigneur fit pour moi des merveilles… il renverse les Puissants de
leur trône, il élève les humbles… »
Cette « Révolution de l’Amour »
est en marche ! mais ne nous trompons pas de combat ! Jean-Paul II disait :
« L'amour est l'unique révolution qui ne
trahit pas l'homme ». Il nous faut regarder Jésus… l’Evangile du Jeudi
Saint dit bien (en grec) que Jésus est allé jusqu’à l’ « extrême »
mais pas n’importe quel extrême ! l’EXTREME de l’Amour « Jésus ayant
aimé les siens qui était dans le monde, les aima jusqu’à l’extrême » (Jn
13). C’est le drame de Juda, lui qui était proche des milieux zélotes radicaux,
d’avoir interprété le message révolutionnaire de Jésus comme une révolution
politique. Mais la Révolution initié par Jésus est bien plus AMBITIEUSE et plus
RADICALE… Elle vise à nous transformer chacun. Jésus le redira à chaque fois qu’on
l’a interrogé : « Mon Royaume n’est pas de ce monde »… dans le sens : il n’est pas de l’ordre de ce monde en tant que champs de la compétition pour le
pouvoir et la possession. Son Royaume est bien Là, au milieu de nous, mais comme un monde AUTRE / Alternatif. Le
Royaume inauguré par Jésus se présente comme une AUTRE manière de VIVRE ce
monde que son Père nous a donné à aimer. Fidèle à cet Évangile le pape François
nous le redisait dimanche :
« Tous
nous savons que le roi que nous suivons et qui nous accompagne est très
spécial, c’est un Roi qui aime jusqu’à la Croix et qui enseigne à servir, à
aimer ».
« L'amour est
l'unique révolution qui ne trahit pas l'homme ». Et pour
nous le montrer, Jésus a accompli un dernier geste avec ses disciples : il
leur a lavé les pieds ! Geste de cet AMOUR EXTRÊME envers nous. Par ce
geste d’humilité, Jésus nous révèle le vrai visage de Dieu son Père : « Il
nous aime jusqu’au bout »… jusqu’à se perdre, être livré, souffrir et
mourir sur une croix !
Le pape
François, s’adressant à vous les jeunes » ajoutait dimanche : « N’ayons
pas honte de sa Croix. Au contraire, embrassez-la pour avoir compris que c’est
dans le don de soi, dans le fait de se dépasser, que réside la véritable joie,
que c’est avec l’amour de Dieu qu'il a vaincu le mal. »
Comme Saint Pierre, nous
cherchons notre Seigneur d’abord dans la splendeur de sa Gloire céleste et de
sa création, dans l’ingéniosité de l’intelligence humaine… mais saurons-nous
reconnaitre le Seigneur dans l’humilié, dans le méprisé, dans la boue et la
fange… Saurons-nous le reconnaître là à nos pieds… Mais qui est donc ce
Dieu qui se met à nos pieds ?…
Nous nous révoltons comme Pierre : « Seigneur
cela ne t’arrivera pas » (Mt 16,22) ou encore « non tu ne me laveras
pas les pieds… »…
Oui il y a bien quelque chose de SCANDALEUX dans ce
geste EXTRÉMISTE de Jésus... L’EXTREME de l’Amour : « ce que je veux
faire, tu ne le sais pas encore : plus tard tu comprendras… » (Jn 13,7)
Je mesure, moi qui suis votre aîné de 20 ans, combien le chemin est encore long pour comprendre ce que Jésus
a fait ce soir là ! C’est seulement l’EPREUVE de la VIE qui nous permet
vraiment de connaitre INTÉRIEUREMENT ce si puissant et déroutant Seigneur dont
nous avons tout à apprendre !
Il n’est pas d’autre chemin pour nous,
les DISCIPLES du Christ, que celui de la communion à la PASSION du Christ Jésus,
le chemin de l’attachement à sa CROIX qui n’est plus perçu comme un instrument
de torture mais comme le SIGNE de celui qui nous a aimé jusqu’à l’EXTREME !
Jusqu’où cela nous mènera-t-il ?
Jusqu’à AIMER comme il nous AIME ! jusqu’à l’EXTRIMITE de l’AMOUR,
mais il s’agit plus de grimper vers les HAUTEURS pour toucher les cieux mais de
DESCENDRE à présent, de s’abaisser ENCORE et ENCORE et se laisser rejoindre par
le TRES-HAUT qui s’est fait le TRES BAS !
Descendre de notre pied d'estale,
de notre « MOI JE », et accepter de se laisser SAISIR par le
SEIGNEUR. La petite Thérèse l’avait bien compris dès 20 ans ! Elle, qui
après avoir cherché à monter marche après marche le grand escalier de la VERTU,
a découvert l’ASCENSEUR de la GRACE –
elle seule suffit ! S’en remettre
comme Jésus dans les bras du PÈRE Seule cette attitude d’humilité, de foi et de
pauvreté peut nous conduire à la JOIE PARFAITE, à la JOIE de la SAINTETE, à la
JOIE du RESSUSCITE !
Jusqu’à aimer comme il nous aime… voici le commandement que nous a
donné Jésus en TESTAMENT ! Saurez-vous, vous les jeunes, répondre à l’APPEL
du Seigneur ?! Êtes-vous prêts à cette extrémité de l’Amour ? à vous DECIDER pour DIEU au SERVICE de l’EGLISE
et du MONDE ?!
Certains parmi vous ont entendu cet
APPEL à vivre cette radicalité de l’Evangile ! Aujourd’hui le Seigneur
appelle des hommes et des femmes à donner toute
leur vie, à aimer et servir en devenant ses prêtres, ses missionnaires ou en
vivant cette extrémité de l’Amour dans la vie religieuse ou consacrée ! Ne
soyez pas sourd à cet APPEL et POSEZ-VOUS
sérieusement la question de l’Appel à une vocation spécifique de prêtre, moine,
religieux, religieuse, consacré, missionnaire... Le Seigneur a besoin de la
disponibilité de chacun pour construire la CIVILISATION de l’AMOUR en ce monde
qu’il aime tellement (Jn 3)… car une REVOLUTION est en marche… la REVOLUTION de
l’AMOUR… croyez mon expérience vous ne regretterez pas ce choix de le suivre !
Pour terminer je voudrais
reprendre ce que disait le pape Benoit XVI s’adressant aux jeunes dans sa
première homélie en 2005: « N’AYEZ PAS PEUR du CHRIST ! Il n’enlève
RIEN, il DONNE TOUT »
Amen
P. jean-Emmanuel GARREAU, homélie du Jeudi Saint 2013, église Saint Julien
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