En
ce jour de Noël, nous nous tenons devant la crèche, devant cet enfant dont le
nom, Jésus, signifie : « le salut de Dieu ». Ce que le prophète
Isaïe annonçait : « les nations verront le salut de Dieu » se
réalise aujourd’hui : nous voyons le « salut de Dieu » en cet
enfant. Aujourd’hui nous avons une place toute particulière comme les santons
que nous positionnons délicatement devant la crèche…..
Noël
nous interpelle sur notre situation : où sommes-nous d’habitude ? où
nous tenons-nous ? où nous plaçons-nous ? Peut être que nous n’avons
plus de place dans le monde. Il nous arrive d’être perdus dans ce vaste monde,
les repères familiers sont bousculés, il y a un trouble dans le genre, les noms
deviennent des numéros, les travailleurs deviennent les pions d’un grand
monopoly planétaire, les émigrés sont des hommes sans qualité ..bref les flux des échanges internationaux nous prennent
et nous engloutissent. Nous sommes un peu déboussolés et quelque fois nous
pensons que n’avons plus notre place dans ce monde.
D’autres
peut être se sont fait une place…une place-forte. Ils se tiennent dans un lieu
protégé. Leur monde est un monde plein de passé, une sorte de musée, où tout
est conservé avec soin…un monde certes familier, qui nous raconte plein
d’histoires d’autrefois mais un monde hors de la réalité et même peut être un monde qui est déjà mort !
Où
donc se tenir dans le monde pour ne pas être emporté par les flots impétueux de
la mondialisation et se perdre dans un monde insensé ? Où donc se tenir
dans le monde pour ne pas s’enfermer dans un musée plein d’images
enchanteresses mais belle et bien pétrifiées ? La réponse nous est donné par la
fête de Noël : se tenir devant la crèche.
Se
tenir devant la crèche, c’est se placer à un commencement : l’enfant de la
promesse est la promesse d’une vie nouvelle, l’ouverture vers un monde nouveau.
Il est l’espérance pour ces bergers, l’espérance pour ces gens de Bethléem l’espérance
le peuple d’Israël, l’espérance pour toutes les nations et pour tous les
hommes. Se placer devant l’enfant de Bethléem c’est se tenir au commencement
d’une histoire….de l’histoire d’un passage, de l’histoire de Pâques.
Bien
plus en se tenant devant la crèche, nous sommes face à un commencement encore
plus profond, plus radical. « Au commencement était le Verbe, la Parole de
Dieu…Par lui tout s’est fait ». Se tenir au commencement dans l’accueil du
Verbe de Dieu, c’est accueillir l’appel à parcourir un chemin, l’appel à
devenir enfant de Dieu, l’appel à partager la gloire à venir. Se tenir devant
Jésus, c’est alors comprendre que notre vie s’ouvre d’une manière inouïe, dans
la liberté et la joie d’être aimé infiniment.
Certes
ce n’est pas le commencement du Faust de Goethe : « au commencement
était l’action ». Nous ne sommes pas les créateurs de notre propre vie,
nous ne sommes pas autocréateur, des démiurges ou des sorciers de notre propre
existence. Non, notre origine ce n’est pas nous-mêmes, mais bien la Parole, le
Verbe de Dieu qui nous appelle. C’est pour cela que notre place est au
commencement : l’espace de notre vie est alors déployé, notre histoire
devient possible car notre avenir est vraiment ouvert par le Christ et pour le
Christ.
Se
tenir devant la crèche, devant ce frêle garçon, dans la nuit de Judée, ce n’est
pas se tenir dans un musée des crèches de Provence, ce n’est pas
« consommer » des émotions religieuses. Se tenir devant la crèche,
c’est adorer celui qui vient nous sauver,
qui nous sauve de l’égarement d’un monde insensé ou de l’enfermement
d’un monde saturé de sens, il est celui qui est le commencement et la fin,
l’alpha et l’omega, l’homme en vérité qui vient ouvrir à l’humanité et à chacun
d’entre nous la route vers la joie qui
n’aura pas de fin. Noël est notre lieu de naissance, Noël est bien la place où
il faut être, une place qui a de l’avenir !
Homélie du P. Xavier Gué, église Notre Dame la Riche, 25 décembre 2012